Les poêles en téflon (et plus récemment en Gen-X et autres produits de remplacement) sont depuis leur diffusion massive dans les années 1960 un incontournable des cuisines grâce à leurs propriétés antiadhésives qui facilitent la cuisson et le nettoyage. Cependant, des préoccupations croissantes quant à leur impact sur la santé et l’environnement nous amènent à repenser leur utilisation.

Le festival Nourrir Liège et Campus 2025 a choisi la poêle en téflon comme emblème anecdotique pour illustrer la thématique One Health en raison de sa portée symbolique et de ses paradoxes. Cet ustensile, bien que pratique et emblématique de la modernité culinaire, est associé à des impacts négatifs sur la santé humaine, animale et environnementale, notamment à cause des substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS) utilisées dans son revêtement. Ces « produits chimiques éternels » polluent les écosystèmes, affectent la santé des êtres vivants et illustrent le lien intrinsèque entre environnement, santé publique et modes de consommation.

En choisissant cet objet du quotidien, le festival met en lumière de manière accessible et ironique les défis complexes liés à une approche intégrée de la santé, tout en invitant à une réflexion sur nos habitudes alimentaires et leurs impacts globaux.

Voir la vidéo de Vincent Verzat qui a testé la teneur en PFAs de son sang (Partager c’est Sympa – participant au festival 2019 dans le JTerre) et signez le manifeste européen sur ce lien (au 18/12/2024 – 143,929 signatures). #BanPFAS #ToxicFreeFuture

Les risques des poêles en téflon : Pourquoi s’en méfier et quelles alternatives adopter ?

L’Université Australienne ANU dénonçait en 2021 dans une étude épidémiologique les risques liés au Téflon (lire l’article). En Belgique, les sites de production ou d’assemblage de poêles en téflon, en particulier celles fabriquées sous la marque Tefal, se sont principalement concentrés dans certaines régions industrielles. Cependant, la production spécifique de téflon en elle-même était généralement concentrée dans d’autres pays (notamment aux États-Unis, avec DuPont). S’il y n’y a pas de chiffre du nombre de poêles avec ce revêtement encore en circulation en Wallonie, on peut estimer que chaque ménage possède au moins une poêle de ce type ce qui équivaut à 1,6 million de poêles possiblement nocives.

Quels sont les risques des poêles en téflon ?

Le téflon est le nom commercial d’un matériau chimique appelé polytétrafluoroéthylène (PTFE), connu pour ses propriétés antiadhésives. Son utilisation peut s’avérer problématique, notamment lorsqu’il est soumis à des températures élevées ou lorsqu’il est rayé.

• Émissions de fumées toxiques à haute température

Lorsque les poêles en téflon sont chauffées au-delà de 260°C, elles commencent à émettre des gaz toxiques. Ces gaz peuvent provoquer une condition appelée fièvre des fumées de polymères chez les humains, et être mortels pour les oiseaux de compagnie très sensibles à ces émanations.

• Présence de composés chimiques appelés PFOA

La fabrication du téflon implique l’utilisation de l’acide perfluorooctanoïque (PFOA), une substance chimique classée comme cancérigène probable pour l’homme par l’Agence Internationale de Recherche sur le Cancer (CIRC). Bien que le PFOA ait été progressivement éliminé de la production de téflon dans de nombreux pays, les anciens produits ou des importations non réglementées peuvent en contenir.

• Dégradation du revêtement

Avec le temps, les rayures et l’usure des poêles en téflon peuvent libérer des microparticules de plastique dans les aliments, ce qui pose des questions sur leur ingestion et leurs effets à long terme sur la santé.

Les PFAS : des polluants persistants, interdictions progressives et risques pour la santé

Les PFAS (substances per- et polyfluoroalkylées) constituent une grande famille de milliers de composés chimiques synthétiques, qui inclut des substances comme le PFOA (acide perfluorooctanoïque) et le PFOS (sulfonate de perfluorooctane). Les PFAS sont surnommés « polluants éternels » en raison de leur persistance extrême dans l’environnement et de leurs effets nocifs potentiels pour la santé humaine, notamment le cancer, des problèmes hormonaux, et des atteintes au système immunitaire.

Leur présence est également préoccupante dans l’eau potable, où des concentrations infimes peuvent être dangereuses. En Belgique les normes concernant les PFAS dans l’eau de distribution sont récentes et suivent les directives européennes de 100 nanogrammes par litre pour la somme des concentrations mesurées de 20 PFAS spécifiquement identifiés dans la directive.

Les préoccupations concernant le PFOA en particulier dans les poêles remontent aux années 1990, mais il aura fallu des décennies pour que la réglementation s’adapte, marquant un tournant en 2008 avec une première interdiction en Europe, suivie d’une extension en 2020. Et il faut noter que malgré l’affichage généralisé de la mention « sans PFOA » sur les produits, des analyses ont révélé des traces résiduelles dans plusieurs modèles testés. En parallèle, des recherches ont montré que les revêtements en Téflon des ustensiles de cuisine peuvent libérer des micro et nanoplastiques lors de la cuisson. Plus le revêtement est endommagé, plus ces substances sont relâchées.

Depuis l’interdiction du PFOA, les industriels ont commencé à remplacer cette substance par de nouveaux PFAS comme le GenX dans la fabrication du Téflon. Toutefois, en l’absence d’études suffisantes sur la toxicité de ces nouvelles substances, des experts plaident pour l’application du principe de précaution. Le GenX a d’ailleurs été classé comme substance préoccupante par l’Agence européenne des produits chimiques​.

L’Union Européenne prévoit d’ici 2025 une interdiction massive visant l’ensemble des PFAS, marquant un effort majeur pour réduire leur impact environnemental et sanitaire.

Alternatives aux poêles en téflon

Face aux inquiétudes suscitées par le téflon, plusieurs matériaux alternatifs permettent de cuisiner en toute sécurité. Par exemple, les poêles et ustensiles en acier inoxydable sont beaucoup plus durables, résistants et ne libèrent aucun produit chimique, même à haute température. Les poêles en acier au carbone sont une excellente alternative aux poêles en téflon. Bien qu’elles demandent un peu plus d’entretien, elles deviennent naturellement antiadhésives au fil du temps. Les poêles en fonte brute sont un autre excellent choix pour la santé. Elles sont durables, naturellement antiadhésives lorsqu’elles sont bien entretenues, et ne contiennent aucun produit chimique (idéale pour les cuissons lentes).

Tableau comparatif des poêles (celle en Téflon est en final pour comparaison)

Infos supplémentaires :

• Poêle en acier au carbone : très robuste/ fort / résistant, elle demande un entretien régulier (séchage immédiat et graissage après chaque utilisation) pour éviter la rouille. Elle s’améliore avec le temps et devient naturellement antiadhésive (qui empêche les substances alimentaires d’attacher).
• Poêle en inox : Très résistante, mais sans propriétés antiadhésives naturelles, elle est souvent utilisée pour saisir à haute température. Compatible avec l’induction.
• Poêle en fonte brute : lourd et très résistant, ce matériau est idéal pour les cuissons lentes à basse température et les grillades. Nécessite un entretien régulier pour maintenir ses propriétés antiadhésives naturelles.
• Poêle en cuivre et inox : Excellente conductivité thermique grâce au cuivre, mais coûteuse et demande un polissage régulier. Idéale pour les cuisiniers professionnels.

Ce qu’il faut retenir

Choisir des alternatives saines aux poêles en Téflon est une première démarche importante pour protéger votre santé et celle de votre famille, en application à minima du principe de précaution. Bien que les poêles en acier au carbone, en inox ou en fonte demandent parfois un investissement initial plus élevé, leur longévité et leurs bienfaits pour la santé en font des choix judicieux et responsables.

Merci aux Stagiaires Lola, Eva, Inès et Rafael et à Farah pour la rédaction de cet article.