1. Les bons Alimentation Locale. Sur le budget du festival, 1/3 (environ 10 000 €) a été consacré aux bons « alimentation locale » sous forme de carnets de 10 tickets d’un euro qui pouvaient être dépensé au QG du festival pendant 10 jours (chalets de producteurs), sur le marché Court-Circuit des producteurs locaux de la Ville De Liège (tous les jeudis) ainsi que dans les quatre magasins de La Coopérative les Petits Producteurs.  L’idée étant de répondre à la fois à la problématique d’accessibilité de la nourriture saine et locale pour les publics précarisés mais aussi à la précarité des producteurs de petite taille et de faire se rencontrer ces deux mondes. Les tickets ont été distribués via les services du CPAS de Liège mais aussi directement à des ASBL en lien avec les publics précarisés, les maisons médicales et les étudiants d’ULiège et d’Helmo (les jours de distribution des paniers solidaires). Le bilan n’est pas encore définitif mais globalement il est positif, ayant permis à un public généralement éloigné de l’alimentation saine et locale de se familiariser avec les offres alternatives tout en soutenant les producteurs locaux.

2. L’implication des Maisons Médicales. Ces dernières années, les maisons médicales de la région liégeoises ont intégré à leur programme de soins une dimension alimentation saine. En amont du festival, la Ceinture Aliment-Terre Liégeoise a rencontré à deux reprises (17/12/20 et 2/03/21) l’Intergroupe liégeois des Maisons Médicales (Igl) qui travaille sur le thème de la santé communautaire. De ces échanges est née une volonté pour plusieurs d’entre elles de participer directement au festival Nourrir Liège. Ainsi, la journée « Santé » du 7/05 a été co-organisée avec l’Igl, avec la participation des Maisons médicales (MM) MM Herma, MM Saint Léonard, MM La passerelle, MM Rive Droixhe, MM du Laveu (voir article). Dans le futur, les maisons médicales souhaiteraient tout particulièrement avoir accès à l’espace public, en particulier à des parcelles pour permettent aux patients de pratiquer des cultures potagères en ville.

3. Les Repas solidaires à emporter. Le banquet solidaire du 15/05 s’est transformé en repas suspendus à emporter pour s’adapter aux conditions sanitaires en vigueur (lire l’article). Des citoyen.nes ainsi que des Maisons Médicales ont financé des repas bio locaux et végétariens pour des publics précarisés. Réalisés par le CISP Échafaudage (sur une recette proposée pour l’occasion par le chef du meilleur restaurant végétarien de Bruxelles Nicolas Decloedt) au sein de la cantine de l’ESA st Luc, livrés à vélo via Rayon 9 et/ou des bénévoles de l’asbl Vaincre La Pauvreté (VLP). Certaines familles venaient directement récupérer les plats sur place et ont commenté de manière enthousiaste l’expérience. Le bilan de cette opération est 100% positif, et selon l’asbl VLP un repas par mois ou même par semaine fonctionnerait à coup sûr. Plus globalement, les plats solidaires avec produits bio locaux ont très bien fonctionné (Casa Nicaragua, Migrations Libre). Pour les pérenniser il faudrait trouver les moyens de financer le surcoût des matières premières (de 3 euros environ par plat).

4.Les conférences gesticulées. Le lundi 10/05 ce fut « Faim de Vie » (voir PV sur ce lien), un outil original créé par Brigitte Grisar (Fédération des Services Sociaux) et Jacques Esnault (membre du « Collectif 1984 », troupe de théâtre-action) et le samedi 15/05 « De la fourche à la fourchette… Non ! L’inverse ! »(à revisionner sur ce lien) de Mathieu Dalmais (Ingénieurs Sans Frontière) . Ces conférences ont fait naitre la conviction qu’il n’y aura pas de fin à la faim sans la construction d’un système alimentaire écologique, rémunérateur, démocratique et solidaire et qu’inversement, il n’y aura pas de système alimentaire durable sans que les mangeurs et ceux qui n’ont pas assez à manger n’orientent la production alimentaire. Une solution serait donc peut-être la mise en place d’une sécurité sociale de l’alimentation, thématique qui était aussi au centre des échanges préparatoire au Tempocolor de septembre prochain (voir plaidoyer).

5. La plénière de l’Aide Alimentaire. Depuis plus de 10 ans, la Concertation Aide Alimentaire Wallonne rassemble les organisations actives dans l’aide alimentaire en Région bruxelloise et en Wallonie. Le 11 mai dernier, dans le cadre du Festival Nourrir Liège et organisé par la Fédération des services sociaux (FDSS), se tenait la plénière de cette Concertation (lire le PV). 30 participants ont échangé concrètement sur la thématique de l’accès à une alimentation de qualité pour toutes et tous, et en particulier les personnes précarisées. Une occasion pour les acteurs de changer de postures, de croiser les regards. L’asbl Racynes a présenté l’évolution de la mise en place de son épicerie sociale, la Maison Médicale de St Léonard ses différentes actions de sensibilisation à une alimentation durable. La projection d’un documentaire sur la BEES coop, supermarché collaboratif bruxellois, a mis en exergue la complexité à intégrer un public précarisé au sein de ces ‘alternatives’. Les participants ont ensuite travaillé en sous-groupe sur une question commune : si vous aviez une baguette magique, que mettriez-vous en place pour favoriser un accès à une alimentation de qualité pour tous en Région liégeoise ?  De la nécessité d’inclure dès le départ les publics précarisés dans la mise en place des projets, en partant de LEURS besoins, aux conditions de travail décent pour les producteurs, les propositions furent très riches.

6. L’exemple des « Paysages Nourriciers » de Nantes. Cette visio-conférence échange (à revisionner en intégralité sur ce lien) organisée par le centre Liégeois du Beau Mur dont le projet Incroyable Comestibles soutenu par la Ville de Liège mérite d’être étendu ! Ainsi l’exemple de la Ville de Nantes qui en pleine pandémie a mis en culture potagère pas moins de 50 sites (représentant au total plus de 25 000 m² et répartis sur l’ensemble des 11 quartiers de la ville) est plus qu’inspirant. Cette association développée par le Service des Espaces Verts et de l’Environnement et le Centre Communal d’Action Sociale de Nantes a permis la récolte de 25 tonnes de légumes en une saison via les employés municipaux avec le soutien des habitants et des bénévoles associatifs nantais, une récolte ensuite redistribuée à un public précarisé (voir le résumé de la rencontre ici).

7. La distribution des excédents du marché. Le premier jour, le Marché de producteurs du QG ayant été écourté pour raisons sanitaires, le Festival a racheté la production de la boulangère de Painprenelle (Erezée) afin de distribuer ses invendus à un public précarisé. Cela a permis aux équipes de découvrir les activités des infirmières de rue de l’asbl Smi-le (présentes à d’autres moments du festival), l’Abri de Jour géré par la Croix-Rouge et ses activités auprès des sans-abris mais aussi le Friskot, kot à projet étudiant dont le frigo solidaire offre une nourriture de plus en plus qualitative aux bénéficiaires. Des initiatives à suivre et à soutenir, comme le fait Foodarity (via la coopérative Le Temps des Cerises).

8. Le Forum « Précarité et alimentation durable » (voir programme). Organisé par la Ceinture Aliment-Terre Liégeoise et ses nombreux partenaires (FdSS, RWLP, FIAN, RdC, AiA, SOS Faim, … etc) le samedi 15/05, il fut un moment riche d’échanges. La table « Producteurs.ices et précarité » a permis de rappeler que malgré les ambitions affichées de la Région Wallonne pour une agriculture et alimentation durable, le parcours d’installation pour se lancer dans le maraîchage est très compliqué, voir « casse gueule » pour les personnes n’ayant pas de bouée de sauvetage. Les systèmes alternatifs (type SPG) reposent aujourd’hui sur la solidarité citoyenne. Il est grand temps que l’État prenne des mesures fortes. A la  table « Précarité et politiques publiques », l’accent fut mis sur le potentiel des régies agricoles communales et sur les leviers propres aux communes pour mettre en place de tels projets. Le bourgmestre de Herstal, présent lors de la table, à annoncé vouloir envisager ce type de projet pour sa commune. La table « sécurité sociale de l’alimentation » fut l’occasion de projeter ce que pourrait être une SSA à Liège. Ce type d’initiative n’étant pas encore mis en place sur d’autres territoires, il a fallu faire preuve d’inventivité ! La table « initiation à l’éducation populaire en alimentation durable » a rappelé que pour une même question, il y a toujours différent angles de compréhension et pas de réponse unique. L’importance de ne pas rester dans l’entre soi de la classe moyenne blanche, non représentative de la diversité dans la société a également été soulignée. La table « Nord Sud » a quand à elle attiré peu de participants.es, ce qui a confirmé le fait que les participants au Forum étaient présents.es principalement pour comprendre et agir sur leurs contextes locaux.

9. La précarité alimentaire étudiante. Pour les équipes de Youth For Climate Liège (Y4C), à l’origine de la conférence « Enjeux & Solutions : Précarité alimentaire étudiante » du dimanche 9/05 en association avec les Students For Climate, la précarité alimentaire fait partie intégrante des luttes sociales et climatiques (Visionner l’intégralité de la conférence et de l’échange sur ce lien). Préalablement à la conférence, l’équipe des Y4C de liège a recueilli 5 témoignages lors de la distribution hebdomadaire des paniers solidaires d’Uliège (plus d’informations sur ce lien). Cela a permis de lancer le débat, auquel participait le Pot-Ingé, Friskot, un étudiant d’ Helmo-stagiaire CATL, et un jeune des Brigades solidaires.

10. La conférence d’introduction et le mot de clôture. La marraine du festival Christine Mahy et le parrain Olivier de Schutter sont deux expert.es dans leurs domaines respectifs et leur présence a été une grande source d’inspiration à la fois pour le public mais aussi pour les équipes du festival et les différents partenaires associatifs et institutionnels. Le compte-rendu de leur échange lors de la conférence d’ouverture est un must-read (sur ce lien) ! Nous retiendrons que l’alimentation est la « variable d’ajustement » des ménages précaires, c’est-à-dire le poste qu’on peut comprimer pour tenter de s’en sortir socialement; qu’il est essentiel d’instaurer des repas de qualité dans les collectivités (idéalement gratuits), que l’aide alimentaire est un système à réformer et qu’il faut impliquer directement les personnes précarisées dans la mise en place de projets d’alimentation durable (bottom-up) et finalement qu’il faut s’intéresser aussi au fait d’avoir une sécurité sociale forte. Le mot de clôture de Christine Mahy peut se ré-écouter sur ce lien.

– – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – –